Pourquoi au XXIe siècle vouloir travailler et faire du pain comme au XIXe ?
Après la seconde guerre mondiale, la fabrication et la consommation de pain blanc c’est généralisé. L’ensemble de la filière c’est mobilisé pour produire ce pain blanc symbole de pureté et de modernité.
Les agriculteurs ont produits des blés modernes, issue de la recherche des semenciers, avec des profils de gluten très particuliers, cultivés avec le maximum d’engrais azotés pour doper le taux protéique. Des blés plus exigeants en traitement de pesticides, plus coûteux en empreinte carbone.
Les meuniers, quand à eux tamisent des farines blanches extrêmement raffinées, y rajoutent des additifs, des exhausteurs de goût et du gluten.
Les boulangers y participent aussi. La mécanisation des boulangeries c’est généralisé, ainsi que l’utilisation de la levure boulangère. Le pétrissage intensif oxyde la pâte, ce qui la blanchit, réduit son goût et aère le pain grâce au renforcement du réseau glutineux. Cela élève l’indice glycémique et accélère le processus de rétrogradation de l’amidon responsable du rassissement du pain. La fermentation rapide (quelques heures) à la levure boulangère ne permet pas de dégrader l’acide phytique présent dans la farine, ce qui réduit notre capacité à digérer l’amidon. L‘acide phytique empêche également l’absorption des micronutriments, mais bon, il y en a très peu dans la la farine blanche.
Résultat, la baguette blanche symbole français par excellence, est devenue un aliment insipide, sans goût. elle est réalisée avec les farines les plus pauvres du marché qui n’apportent aucun nutriments au corps. Le pain blanc contient généralement beaucoup trop de sel et beaucoup de sucre (glucides).
Voici pour le constat…
Et la réponse des consommateurs a été de réduire, voire de supprimer totalement la consommation d’un pain qu’ils avaient de plus en plus de mal à digérer et de moins en moins de plaisir à manger.
Alors un pain sans goût, mauvais pour la santé et la planète…
Quelle réponse apporter à mon petit niveau alors que je commence ma nouvelle activité de boulanger ?
LE CHOIX DE LA FERMENTATION LONGUE
J’ai fait ce choix pour le goût du pain :
Le faible pétrissage, réduit l’oxydation de la pâte, permettant ainsi de conserver les arômes de la farine. La fermentation longue permettre l’expression des enzymes naturellement présentes dans la farine, réduit l’alvéolage de la mie, offrant ainsi une mâche plus franche et développe des arômes tout à fait singulier.
J’ai fait ce choix pour la santé :
La fermentation longue au levain pré-digère le gluten, ce qui rend le pain plus digeste. Elle permet de mieux assimiler minéraux et micro-nutriments grâce à l’action du levain sur l’acide phytique. Elle améliore l’indice glycémique et permet de réduire la quantité de sel (14 g/kg de farine contre 18 à 22 g/kg habituellement).
J’ai ce choix pour la planète :
Des farines de meule (T80) bio et locales pour réduire l’empreinte environnementale (azote, nitrate, pesticides et carburant). Un pétrissage manuel, des fermentations à température ambiante et une cuisson dans un four à bois pour réduire mon empreinte énergétique (une consommation électrique quasi nulle). Ce sont mes choix pour faire un pain bon pour la santé de l’homme et de la planète.
Un pétrissage manuel minimal, un ensemencement au levain extrêmement faible et un temps de fermentation très long de 24 heures, tout ça à température ambiante : c’est le pain de la décroissance !
Vincent
NB : Ce sont les recherches de Christian Rémésy qui m’ont orientés vers cette approche de la panification que l’on n’apprends pas en CAP.
Pour approfondir ce sujet, voici quelques articles :
Développer une nouvelle approche de la panification, pour un pain naturellement plus goûteux.
Comment donner une lisibilité nutritionnelle à votre offre de pain ?
Diminuer de moitié l’ajout de sel et améliorer la qualité du pain !
La boulangerie devra relever un nouveau défi, écologique et nutritionnel
L’acide phytique
Farines : toutes les mêmes ? Attention danger…